Prisonnier
© Judith Clay On ne se libère pas de la matière On l'épouse, on l'embrasse On l'ingère, on la digère On fait corps avec elle On l'habite, on l'expérimente On tâche de l'apprivoiser De s'y frayer un chemin On s'y révèle parfois On s'y perd souvent On y sommeille, on s'y réveille On y apparaît un jour Programmés d'amour On y grandit, on y vieillit Puis on s'en soustrait On disparaît, c'est ainsi On s'incarne jusqu'à la mort C'est le sort du corps toujours C'est la règle de la vie La seule échappatoire... La matière nous étreint depuis naissance Et nous transporte jusqu'à conscience En nous chantant tout le dérisoire De notre magnifique insignifiance On ne se libère pas de la matière On tâche d'y faire équilibre À la manière d'un artiste Tel un trapéziste sur un fil On tente d'en saisir le subtil On essaie d'y faire merveille Puis on la quitte subitement Comme on f...